La loi oblige les syndicats de copropriétaires à assurer leur immeuble. La plupart des déclarations de copropriété l’imposent également. Cela peut surprendre, à priori, car le syndicat n’est propriétaire ni des parties privatives ni des parties communes. Toutefois, sa mission première consiste à assurer la conservation et la pérennité du bâtiment, qu’il doit gérer et administrer selon les règles de l’art. Voilà pourquoi le législateur lui a reconnu un intérêt assurable et lui a imposé l’obligation de souscrire une assurance pour le bâtiment.
Biens couverts
L’assurance doit couvrir les parties communes, les parties privatives (à l’exclusion des améliorations qui y ont été apportées) et les biens meubles appartenant au syndicat. Cette souscription sera faite au nom du syndicat, dont l'identité figurera à la police d’assurance. Il faut se rappeler que les copropriétaires, tout autant que leurs créanciers hypothécaires, ne sont pas les assurés dans ce cas-ci. Quant aux améliorations qui ont été apportées aux parties privatives, il appartient à chaque copropriétaire de les protéger par une assurance individuelle, autant celles qui ont été faites par les propriétaires précédents que les leurs.
Unité de référence
Par ailleurs, l’article 1070 du Code civil du Québec comporte un troisième paragraphe qui prévoit que « Le syndicat tient enfin à la disposition des copropriétaires une description des parties privatives suffisamment précise pour que les améliorations apportées par les copropriétaires soient identifiables. Une même description peut valoir pour plusieurs parties lorsqu’elles présentent les mêmes caractéristiques. ». Cette description, qui fait office d’unité de référence, doit être consignée au registre de la copropriété, afin que les copropriétaires qui en font la demande puissent la consulter. Rappelons que ce paragraphe est en lien direct avec l’obligation d’assurer l’immeuble tout entier, incluant les parties privatives, à l’exclusion des améliorations qui y auraient été apportées (en vertu de l’article 1073 du Code civil du Québec).
Pour les syndicats de copropriétaires qui ont négligé de produire cette description, ceux-ci ont intérêt de le faire dès maintenant, car en cas de sinistre, il peut y avoir de lourdes conséquences. Précisons que l’article 1073 C.c.Q. a été modifié pour indiquer notamment que les améliorations apportées par un copropriétaire sont exclues de l’assurance du syndicat, « lorsqu’elles peuvent être identifiées par rapport à la description de cette partie ». Ainsi, si les améliorations ne peuvent être identifiées, parce qu’un syndicat n’a pas établi cette description, celui-ci devra les assurer. Il serait injuste de faire supporter ce défaut d’agir à un copropriétaire (par exemple, un copropriétaire de 3e génération incapable d’apprécier ce qu’il devrait assurer à titre d’amélioration) et il reviendra alors au syndicat de couvrir l’immeuble dans son intégralité. Cela risque toutefois d’être inéquitable pour certains copropriétaires qui n'ont pas d'améliorations apportées dans leur partie privative. Ces derniers devront assumer une partie de l'accroissement de la prime d'assurance du syndicat, et ce en raison des améliorations apportées dans d'autres parties privatives.
Risques couverts
Depuis 1994, l’article 1073 C.c.Q. prévoyait que le syndicat doit souscrire des assurances « contre les risques usuels, tels le vol et l’incendie », sans spécifier tous les risques devant être couverts par cette assurance. Ce problème se trouvait généralement résolu en souscrivant une assurance « tous risques », mais le législateur a jugé bon de préciser quels risques doivent être minimalement couverts, ainsi que la façon d’exclure certains d’entre eux.
L’article 1073 C.c.Q. a donc été modifié en biffant, au premier alinéa, les mots « tels le vol et l’incendie » et en ajoutant, au dernier alinéa : « un contrat d’assurance souscrit par un syndicat couvre de plein droit au moins les risques prévus par règlement du gouvernement, à moins que la police ou un avenant n’indique expressément et en caractères apparents ceux de ces risques qui sont exclus... »
Cette modification ajoute une obligation formelle pour les assureurs de couvrir un certain nombre de risques, sauf s’ils sont exclus en les identifiant clairement au syndicat, en caractères apparents, dans la police d’assurance ou dans un avenant.
L’article 4 du Règlement prévoit que les risques qu’un contrat d’assurance de bien souscrit par le syndicat doit couvrir sont : « le vol, l’incendie, la foudre, la tempête, la grêle, l’explosion, les fuites et débordements d’installations sanitaires et d’appareils raccordés aux conduites de distribution de l’eau à l’intérieur d’un bâtiment, la grève, l’émeute ou un mouvement populaire, l’impact d’un aéronef ou d’un véhicule et les actes de vandalisme ou de malveillance. »
Cet article a pris effet le 15 avril 2021. Toutefois, pour les syndicats ayant déjà souscrit une assurance de biens en vigueur, le 15 avril 2021, l’obligation ne s’appliquera qu’à compter du renouvellement de la police d’assurance si le renouvellement a lieu dans les 12 mois suivant le 15 avril 2021. Si l’expiration de la police d’assurance se produit après le 15 avril 2022, les prescriptions de l’article 4 du Règlement s’appliqueront à compter de cette dernière date.
Par ailleurs, seuls les sinistres accidentels seront couverts. On se protège ainsi des conséquences dommageables liées à des événements imprévisibles, soudains et aléatoires. Les dommages non accidentels ne sont habituellement pas pris en charge par l’assureur. Ce dernier ne couvre pas non plus les pertes provenant d’un vice propre à la chose, tels un vice caché ou une malfaçon lors de la construction de l’immeuble. Il en est de même pour les dommages qui résulteraient d’un défaut d’entretien chronique des parties communes par le syndicat. Celui-ci doit donc veiller à leur entretien rigoureux, car l’assureur ne le fera pas à sa place.
Valeur à neuf (de reconstruction)
Depuis la réforme du Code civil, en 1994, la loi imposait au syndicat de souscrire une assurance couvrant la « valeur à neuf » de l’immeuble. Afin d’éviter toute ambiguïté, le législateur oblige dorénavant au syndicat, et ce depuis le 15 avril 2021 (ou subséquemment si la couverture d'assurance vient à échéance après cette date), de souscrire une assurance couvrant la « valeur de reconstruction » de l’immeuble. Celle-ci correspond à la somme qu’il faudrait débourser pour reconstruire l’immeuble entier, advenant une perte totale, sans tenir compte de son état de vétusté. Cette valeur de reconstruction doit notamment tenir compte du coût de démolition, des honoraires des professionnels, par exemple ceux de l'ingénieur ou de l'architecte, de la mise aux normes, de l'usage et des règles de l’art, ainsi que des taxes applicables (TPS et TVQ). Au moment de souscrire une police, le courtier ou l’agent en assurance de dommages demandera au conseil d’administration quel est le montant d’assurance requis, afin que la couverture soit adéquate.
Montant de couverture nécessaire
Pour profiter de primes moins coûteuses, certains conseils d’administration ont tendance à sous-estimer, volontairement ou involontairement, les coûts de reconstruction de leur bâtiment. À défaut d’assurer l’immeuble pour la valeur à neuf (de reconstruction), le montant provenant des assurances risque de ne pas être suffisant, en cas de sinistre total ou partiel. S’il y a perte totale, l'assureur est libéré par le paiement du montant de l'assurance souscrite. Mais advenant une perte partielle, l’indemnité sera calculée conformément à la règle proportionnelle, sauf si la police d’assurance comporte une clause dite à montant stipulé, qui élimine de facto la règle proportionnelle moyennant certaines conditions clairement stipulées. Les administrateurs du syndicat pourraient alors engager la responsabilité de ce dernier, voire la leur à titre personnel.
Pour contrer cet état de fait, la loi prévoit que dorénavant, tout syndicat doit faire évaluer la valeur de reconstruction, aux fins d’assurance par un professionnel. La valeur de reconstruction doit être évaluée au moins tous les cinq ans par un évaluateur agréé, membre en règle de l’Ordre des évaluateurs agréés du Québec (OEAQ). Cette obligation a pris effet le 15 avril 2021. Ainsi, à l’égard d’une copropriété pour laquelle l’évaluation a été effectuée dans les quatre ans précédant le 15 avril 2020, par un évaluateur agréé, le syndicat aura cinq ans suivant la date de cette évaluation pour en faire réaliser une nouvelle (article 3 du règlement).
BON À SAVOIR ! Le Gouvernement du Québec a publié dans la Gazette officielle du Québec, le 15 avril 2020, un règlement sur les assurances en copropriété divise, qui vient préciser les modalités et les dates d’entrée en vigueur de certaines des dispositions introduites par le projet de loi 141, en juin 2018.
À RETENIR: La police d’assurance du syndicat doit prévoir, en toutes circonstances, une renonciation à d’éventuels recours en subrogation contre les copropriétaires, les personnes qui font partie de la maison d’un copropriétaire, les administrateurs, le gérant, le président et le secrétaire de l’assemblée des copropriétaires et les autres personnes chargées de voir à son bon déroulement. Depuis le 13 décembre 2018, un tel recours subrogatoire de l’assureur du syndicat est légalement exclu, sauf pour un préjudice corporel ou moral ou encore un préjudice dû à une faute intentionnelle ou à une faute lourde.
ATTENTION ! Lors de la souscription de la couverture d’assurance du syndicat, le conseil d’administration doit déclarer toutes les circonstances de nature à influencer de façon importante un assureur dans l'établissement de la prime, l'appréciation du risque ou la décision de l'accepter. S'il néglige de transmettre toute l'information pertinente à l'assureur, le syndicat s'expose à une négation de la protection, ou à une réduction de l'indemnisation au moment d'une réclamation.
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