Droits de retrait et de préemption

En copropriété indivise les droits de retrait et de préemption peuvent perturber le cours d’une transaction immobilière. Il est important de savoir que dans ce type de copropriété, les autres copropriétaires peuvent avoir préséance sur un éventuel acquéreur.  Le titre de propriété de ce dernier pourrait être précaire pour un certain temps : un acheteur qui acquiert des droits dans une copropriété indivise sans avoir d'abord reçu l'approbation de tous les copropriétaires indivis s'expose donc à voir sa quote-part rachetée et à être ainsi écarté de l'indivision.

Droit de retrait

L’article 1022 du Code civil du Québec accorde un droit de retrait aux copropriétaires dans une copropriété indivise. Aux termes de cet article, un indivisaire peut racheter la quote-part indivise d’un immeuble qu’un autre indivisaire a vendu à un tiers (personne étrangère à l’indivision). Dans un tel contexte, les indivisaires ont 60 jours à compter de la connaissance de la transaction (la plupart du temps une vente) pour procéder au rachat de cette quote-part, en remboursant au tiers acquéreur le prix d’acquisition et les frais liés (courtier immobilier, notaire, etc.) à la transaction. Ce droit ne peut toutefois être exercé que dans l’année suivant la date de la transaction. À noter que l’acheteur ne peut s’y opposer, ce qui pourrait entraîner des conséquences pour le moins désastreuses! En pratique, cependant, cela arrive très rarement, les notaires ayant pour rôle, lors de la transaction, d’effectuer les vérifications nécessaires à cet effet.

Droit de préemption

Lorsqu’une convention d’indivision est publiée sur un immeuble, il arrivera le plus souvent qu’une clause de renonciation à ce droit de retrait soit présente et que celle-ci soit remplacée par un droit de préemption (aussi désigné et connu également sous les expressions « droit de premier refus » ou « pacte de préférence »). Ce droit oblige l’indivisaire qui souhaite vendre sa quote-part à l’offrir tout d’abord aux autres indivisaires, sauf exception (par exemple, lorsqu’un indivisaire vend sa quote-part ou une partie de celle-ci à son conjoint).

Quoi qu’il en soit, lorsqu’il est soumis à un droit de préemption, un indivisaire doit faire parvenir aux autres indivisaires un avis indiquant les prix et conditions auxquelles il se propose de vendre sa quote-part. Ces prix et conditions doivent être identiques à ce qui lui a été ou aurait été proposé par un acheteur de bonne foi. Par la suite, les autres indivisaires bénéficient d’un délai (pouvant varier selon la rédaction de la clause) pour se prononcer. Si tous les indivisaires renoncent à exercer leur droit de préemption ou si l’acte de vente n’est pas conclu dans le délai prévu, l’indivisaire qui souhaite vendre sa quote-part peut alors le faire, mais pour un prix et des conditions au moins égaux à ce qui a été offert aux autres indivisaires.

Il est important de noter que l’article 1022 du Code civil du Québec prévoit que les droits de retrait et de préemption ne peuvent coexister. En effet, la présence d’un droit de préemption entraîne automatiquement une renonciation tacite au droit de retrait. Certaines conventions d’indivision peuvent également contenir un droit d’achat au décès d’un indivisaire. En présence d’une telle clause, il y aurait lieu de consulter un professionnel afin de bien comprendre les droits et obligations en découlant.

Et la copropriété divise dans tout cela?

En ce qui concerne les copropriétés divises, aucune disposition du Code civil du Québec ne crée de droit de retrait en faveur des copropriétaires, ceci constituant donc un certain avantage. Certaines déclarations de copropriété comportent toutefois une clause créant un droit de préemption et ce, malgré le fait que l’article 1056 du Code civil du Québec édicte que la déclaration de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires, sauf celles qui sont justifiées par la destination de l’immeuble, ses caractères ou sa situation. Or, parmi les droits d’un copropriétaire se trouve celui de disposer librement de son bien. Conséquemment, une clause de la déclaration de copropriété qui accorderait un droit de préemption pourrait contrevenir à cette disposition et être invalidée par un tribunal.

Cependant,  il n’est pas rare de trouver une telle clause dans les petites copropriétés, auquel cas ceci pourrait être justifié par la destination de l'immeuble, où notamment, la collaboration des copropriétaires est indispensable au bon fonctionnement du syndicat et où la volonté de préserver cette convivialité pourrait donc justifier à certains égards des restrictions au droit de disposer librement d’une fraction, comme l’existence d’un droit de préemption.

Quoi faire lorsque l’on veut vendre?

Pour tout copropriétaire qui souhaite vendre son unité de copropriété indivise (ou de copropriété divise dans une petite copropriété), il est requis de vérifier d’emblée la présence de clauses de droit de retrait et de droit de préemption.

Les conventions d’indivision comportent souvent une renonciation au droit de retrait. Si ce n’est pas le cas, il y aurait lieu de faire signer par les autres indivisaires une renonciation à ce droit et peut-être même, après consultation avec un notaire, apporter une modification à la convention d’indivision même.

Quant au droit de préemption, il y a lieu de lire la clause attentivement, avec l’aide d’un professionnel, au besoin, afin de bien la comprendre et d’envoyer les documents requis aux autres indivisaires (ou copropriétaires). Ceux-ci devront accuser réception et il y aura lieu d’obtenir des preuves documentaires dans l’éventualité où ils n’ont pas souhaité se porter acquéreur.

Le notaire, lors de l’examen des titres, n’a pas à juger de l’opportunité d’une clause de préemption, mais il doit en soulever l’existence et en expliquer les conséquences. Le non-respect de la clause peut entraîner un recours en dommages-intérêts de la part des personnes lésées. Dans le tourbillon des transactions, il devient important pour le vendeur de vérifier le tout d’emblée, afin d’éviter que le notaire ait à communiquer lui-même avec tous les indivisaires ou copropriétaires et obtenir ou faire signer tout document requis. Cela pourrait occasionner des délais supplémentaires dans le dénouement d’une transaction.

 

BON À SAVOIR ! En copropriété indivise, une offre d’achat devrait toujours être conditionnelle à ce que le vendeur fournisse à l’acheteur copie d'une renonciation des indivisaires à exercer le droit de retrait ou de préemption.

https://www.condolegal.com/images/Boutons_encadres/A_retenir.pngÀ RETENIR:​ Le Code civil du Québec n'encadre que très peu les droits et obligations des indivisaires. Pour assurer la protection du public, l'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ) a créé des formulaires pour ces situations, et que les courtiers doivent utiliser : le Contrat de courtage exclusif – Copropriété par indivision et la Promesse d’achat – Copropriété par indivision.

ATTENTION ! Les conventions d’indivision prévoient généralement qu’un copropriétaire doive offrir sa quote-part de l’immeuble aux autres copropriétaires avant de l’offrir à un tiers. Certaines permettent même aux autres copropriétaires d’égaler l’offre que le tiers pourrait faire pour acquérir cette quote-part, suivant des modalités prévues à la convention. C’est ce qu’on appelle le « droit de préemption »

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